En 1960, Philippe Jaccottet découvre les grands maîtres du Haïku dans une traduction anglaise de R.H.Blyth.
Dans sa préface à un livre publié chez Fata Morgana et intitulé HAÏKU (1996), voici ce qu'il écrit:
"La musique du haïku est le contraire d'une musique guerrière...pas de trompettes, à peine un bruit d'éventail, plié, déplié, quelques syllabes extraordinairement libres et légères...réunir "deux choses de notre monde mortel, menacé, données à nos sens mortels, défaillants : le bruit d'une rame et la brume; des arbres et des jeux de dés; l'ombre et le chant d'un oiseau; de la rosée et des armes...tout semble ici extraordinairement tranquille et merveilleusement naturel. Ni rêves, ni regrets. Le contraire même de "N'importe où hors de ce monde". On est dans ce monde-ci: mais ce monde-ci est une maison ouverte, dont un souffle à peine perceptible fait légèrement battre les portes, flotter les rideaux de bambous....On ne prétend à rien, on n'explique rien non plus. La conscience de n'être jamais qu'un voyageur vous lave les yeux.
La "parole du haïku reste toujours simple et naturelle ou du moins le paraît. Ce qui a fait croire à certains que c'était facile. Mais ce n'est pas du tout facile (comme ont l'air de le croire ceux qui fabriquent aujourd'hui du haïku en série.) Il faut viser d'autant plus juste que sont peu nombreux les éléments du poème, en peser le poids sur des balances d'autant plus plus sensibles qu'ils sont légers. Alors seulement, la cible atteinte n'est plus une cible, mais une ouverture où la flèche se sera engouffrée ; alors seulement , le coup d'éventail imperceptible aura produit une onde capable de se propager à l'infini."
Le vendeur d'éventails
portant son faix de vent :
comme il fait chaud !
Kakô
Quand la neige a fondu
le village
est plein d'enfants .
Issa
Allumant une bougie
à une autre bougie :
une soirée de printemps.
Buson
La première luciole !
en allée, envolée,
le vent m'est resté dans la main.
Issa