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samedi 31 mars 2018

JE NE SAIS QUOI et PRESQUE RIEN

En avant première , un article sur une exposition commune de peintures de Pierre CONVERSET et de gravures de Jacques POULLAOUEC qui se tiendra à la Galerie "Les BIGOTES" à VANNES du 3 au 26 Août 2018 .


                                                    "Je ne sais quoi et Presque rien"


Voilà un titre et modeste et ambitieux, directement emprunté au philosophe Vladimir Jankelevitch.

                                             Gravure et contrecollé de Jacques Poullaouec




                                              Peinture à l'encaustique de Pierre Converset





Je ne sais quoi et presque rien




«  Pour toute la beauté
jamais je ne me perdrai
sinon pour un je ne sais quoi
qui s'atteint d'aventure. »

Jean de la Croix




Parfois on ne trouve pas ce qu'on cherche mais on trouve ce qu'on n'a pas cherché et qui nous arrive d'aventure. Sérendipité !
L'artiste est toujours en avant de soi ; sa main précède son esprit qui, comme l'aveugle, marche, avance progressivement, à tâtons. Il invente son parcours, sans en connaître le but. Il faut donc se lancer à l'assaut de l'imprévu, comme le bateau qui affronte la vague.
Se laisser dériver sur ses lignes d'erre ; pas de message, pas de figuration, mais un rapport de clair et d'obscur. On peut dire comment on navigue sur le papier ou sur la toile, on ne peut dire le pourquoi. Sur l'espace ouvert par la main, au départ c'est « presque rien » et à l'arrivée c'est un « je ne sais quoi ». Ce n'est pas aveu d'ignorance, bien au contraire, c'est la recherche délibérée de « l'inconnu, pour trouver du nouveau » (derniers mots des Fleurs du Mal de Baudelaire)
Exprimer l'inexprimable, l'entre-deux, la zone de brouillard, de brouillage, de fading, d'embrouillement. Cette aventure est quelque chose d'indéfini, d'indéfinissable ; quelque chose qui ne s'apprend pas ; c'est le faire qui importe, le « poïeïn » de l'étymologie grecque du mot « Poésie ».
Le titre que nous avons choisi pour cette exposition est à la fois modeste et ambitieux. Nous l'avons emprunté à Vladimir Jankélévitch qui dit du « presque rien » : « Je ne sais ce qu'il est, mais il n'est pas « je ne sais quoi » ; je ne sais ce qu'il est, mais il est à coup sûr quelque chose ». La main du peintre et celle du graveur ont une mémoire qui remonte dans leurs gestes, sans qu'ils l'aient préméditée ; c'est une anamnèse, une réminiscence, « une trace qui ne laisse pas de traces. Elle n'a pas le poids du souvenir, elle est plutôt la touche fugitive qui nous effleure, souvent même à notre insu … À la fois il en reste quelque chose et il n'en reste rien ».

Pierre Converset
Jacques Poullaouec.